(journal de mes sensations)

lundi 24 septembre 2012

Métempsycose, théorie personnelle.

En passant chez Douce, je tombe sur ce texte de Fernando Pessoa :
Rien ne m'attache à rien.
Je veux cinquante choses en même temps,
Avec une angoisse de faim charnelle
J'aspire à un je ne sais quoi —
de façon bien définie à l'indéfini...
Je dors inquiet, je vis dans l'état de rêve anxieux
du dormeur inquiet, qui rêve à demi.
On a fermé sur moi toutes les portes abstraites et nécessaires,
on a tiré les rideaux de toutes les hypothèses que j'aurais pu
voir dans la rue,
il n'y a pas, dans celle que j'ai trouvée, le numéro qu'on m'avait
indiqué.
Je me suis éveillé à la même vie sur laquelle je m'étais endormi.
Il n'est jusqu'aux armées que j'avais vues en songe qui n'aient été
mises en déroute.
Il n'est jusqu'à mes songes qui ne se soient sentis faux dans
l'instant où ils étaient rêvés.
Il n'est jusqu'à la vie de mes vœux — même cette vie là — dont
je ne sois saturé.

[...] Fernando Pessoa

Comment écrire quand les mots que l'on tente de formuler l'ont déjà été ? Comment dire qui l'on se sent être quand on se reconnaît, si intimement, au hasard d'une lecture ? À lire Pessoa, je ne peux m'empêcher de penser que la transmigration des âmes est un phénomène intemporel et constitutif de toute vie. J'y vois une métempsycose inversée, dont le processus tiendrait au fait que l'âme est universelle et unique. Elle possède toutes les dimensions, toutes les connaissances et se trouve présente à l'image de ce que l'on nomme, le vide tout autour, l'air ou l'espace...
Accessible à tous, nous nous en imprégnions en permanence mais n'avons accès qu'à ce à quoi nous sommes disposés ou ouverts. Ce n'est pas l'âme qui s'incarne en nous, c'est nous qui nous élevons en elle en une sorte d'assomption. Selon notre nature profonde, la capacité et la sensibilité de notre esprit, notre vécu... nous percevons alors des horizons plus ou moins vastes... Peut-être y ai-je accès avec les mêmes dispositions psychiques et réceptives que Pessoa (ce qui ne me dispose pas pour autant au même talent), et ainsi, ce qu'il écrit me semble être ce que je ressens, m'est particulièrement intime, me touche profondément. En quelque sorte, j’accède à un état d'assomption similaire auquel parvenait (entre autres), Fernando Pessoa.
Ça marche aussi avec celle ou ceux que j'aime, celle qui me touche... Partageant la même part d'âme, atteignant la même clarté, nous sommes potentiellement capables de ressentir, prédire ou deviner, alors que nous sommes physiquement séparés, l'état psychique et même physique de cet autre adoré ; notre instinct, notre empathie, sont exacerbés par les émotions et cet état d'âme, partagés... C'est, en tout cas, ce à quoi je crois. C'est en tout cas, ce qui m'explique le mieux ce qui m'est arrivé... 
Une seule âme, universelle, un tout propre à tous, nous unissant. D'ailleurs, il suffit de ressentir rien qu'une fois cette même émulation ou émotion qui tout à coup gagne une foule...     

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