(journal de mes sensations)

mercredi 12 septembre 2012

Accoutumance et sevrage

06h45, je suis au bureau depuis presque une heure et demie, j'avale ma première gorgée de thé et réalise que tout ce qui s'est passé jusqu'à cette seconde, semble ne pas avoir existé. Depuis 04h00 ce matin, j’accomplis toutes les tâches nécessaires à préserver ma dignité... machinalement, sans conscience de l'instant.
Il est peut-être temps que je pense à faire autre chose ?
Il y a onze ans, déjà un matin tôt, à 04h30 devant la machine à café qui me servait un jus âcre et amer, j'allume une cigarette ; tire cette première bouffée qui envahit immédiatement mes poumons et mon esprit... puis expire la fumée, allégée de presque toutes les cochonneries qu'elle contient... avec dans la tête un arrière-goût, métallique. Un geste devenu banal pour être exécuté chaque matin, et c'est justement ce qui soudain me dérange. J'avais toujours prétexté, fumer par plaisir, et là, à cet instant précis, je prenais conscience que ce n'était plus le cas. En une bouffée prise trop tôt le matin, je ressentais les sensations de toutes les précédentes... celles du matin ; d'après les repas ; en voiture ; lors d'un cocktail ou dehors quand il fait un froid sec. La dernière d'une nuit blanche alcoolisée ; celle, la plus symptomatique de la dépendance physique, au sortir d'un de ces vols longs courriers... Il était 04h35 du matin, un gobelet de mauvais café à la main... ce fut ma dernière !
Bon, ce ne fut pas aussi simple et illuminé... Depuis plusieurs mois déjà, je ne retenais plus que les désagréments de fumer, d'une certaine manière, je me préparais psychologiquement à la rupture. La décision finale, eut bien, quant à elle, la soudaineté de la prise de conscience du caractère absurde de cet acte devenu réflexe. J’arrêtais par la même occasion, de boire cet infect café qui me tordait l'estomac et quelques jours plus tard, commençais, les barres chocolatées !
Deux ans et six kilos plus tard, j'étais, je le pensais, sevré. J'ai bien peur que l'on ne le soit jamais ! Le manque se fait de moins en moins âpre, c'est incontestable, et bien que l'on oublie, même plusieurs fois par jour, voire plusieurs jours par mois, et plusieurs mois... cela reste en vous, endormi et, il est sage de garder quelques cartouches pour pouvoir lui faire front, le cas échéant.
Je n'ai pas l'intention de lui céder aujourd'hui, c'est juste qu'il faut souvent une décision aussi brutale que soudaine pour casser une habitude, mais pas seulement ! Il faut aussi s'être longuement persuadé du bien-fondé de cette rupture et ne jamais baisser la garde, tout particulièrement quand la victoire paraît n'être plus qu'une vieille histoire. Il en va de même avec l'alcool, les sucreries, la drogue... Et, l'amour ? 
Bien que je croie que ce soit, dans le domaine des psychotropes, une exception. C'est en effet le seul cas où il ne nous est pas nécessaire d'absorber une substance chimique étrangère à notre organisme, nous la produisons nous-même ! Nous sommes à la fois le laboratoire, le distributeur et le consommateur ! Quelle merveille que ce corps et notamment, ce cerveau. Nous pourrions, sans doute, faire beaucoup plus de chose avec, si un mode d'emploi nous avait été fourni.
On a vu, en amour, tant de retournement de situations, qu'il semble impossible, dès lors que l'on a vraiment aimé, d'avoir la certitude que l'on n'aime plus...
Me vient à l'esprit cette chanson de Jacques Brel : "Mathilde est revenue".
C'était pour causer, parce qu'en ce qui me concerne, personne de ma connaissance n'est revenue ! Quant au début de ce billet, je ne pense pas que mon travail, uniquement alimentaire, soit ou devienne pour moi une accoutumance, même si pour rompre avec ce qu'il convient d'appeler une facilité confortable, il me faudrait agir comme tel. 
Je rêve d'un travail qui, pour moi n'en serait pas un, au sens que lui confère cette culture de lutte de classe... Un travail que je puisse pratiquer n'importe où et quand bon me va. J'imagine qu'un travail comme ça, pourrait alors vite devenir une addiction, presque au même titre... qu'un amour ?
Il me suffit de constater et comparer aujourd'hui, la nature de l'occupation pour laquelle je ne compte jamais le temps passé, à celles dont l'instant nécessaire, aussi bref soit-il, m'est insupportable...
Un rêve comme celui-ci semble à ma portée. En tout cas plus que de gagner au Loto et plus que de parier sur l'évolution des sentiments de certains, à mon égard. Rêve, certes, théoriquement à ma portée, mais il me faudrait, cependant, briser quelques chaînes et convictions intimes... fondées ou pas... et ça, c'est une autre histoire.

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